Le 25 janvier 2023, la chambre correctionnelle de Saint Laurent du Maroni a condamné pour exploitation minière illégale portant atteinte à l’environnement par la coupe de bois et forêt l’un des deux prévenus qui comparaissaient devant elle le 23 septembre dernier. Le tribunal le condamne à deux ans d’emprisonnement avec sursis, à l’interdiction définitive d’exercer l’activité minière et au versement de 5 000 euros de dommages et intérêts pour chaque partie civile, l’Office National des Forêts (ONF), le Parc Amazonien de Guyane (PAG) et Guyane Nature Environnement. L’autre prévenu est quant à lui relaxé. Retour sur l’affaire.
De l’orpaillage illégal par un exploitant légal
Entre 2017 et 2020, les agents de l’ONF et des services de l’Etat ont constaté à 5 km à l’Est du bourg de Papaïchton plusieurs chantiers de mine d’or artisanale en-dehors des périmètres autorisés à l’activité minière, autrement dit des chantiers d’orpaillage illégal. Dans ce secteur, la société Robert EDA était alors titulaire de deux autorisations d’exploitation minière sur la crique Bamba, valable jusqu’en 2016 pour l’une et jusqu’en 2019 pour l’autre: les chantiers hors-titre étaient pour certains en continuité directe avec les travaux réalisés sur ces périmètres.
Lors de l’audience, a été évoquée la relation entre les deux prévenus, Robert EDA et Christian BLAKAMAN: Robert EDA ayant souhaité se retirer de l’exploitation minière, ce dernier aurait conclu un contrat avec Christian BLAKAMAN pour terminer cette exploitation jusqu’en 2019, avec le conseil et l’accord des services de l’Etat.
La chambre correctionnelle de Saint Laurent du Maroni retient la nullité de la procédure pour Robert EDA et la culpabilité de Christian BLAKAMAN pour des faits d’exploitation minière illégale ayant porté atteinte à l’environnement par la coupe de bois et forêts. En effet, une exploitation minière illégale, provoque une déforestation incontrôlée, une perte de biodiversité non maîtrisée et des pollutions chroniques aux matières en suspension par le lessivage des sols.
Face à ces destructions incontrôlées, Guyane Nature Environnement en appelait à un respect strict de la réglementation et des procédures en vigueur et s’est donc constituée partie civile. L’association a pu obtenir réparation d’une partie du préjudice subi, à l’instar de l’ONF et du Parc Amazonien de Guyane également parties civiles au procès.
La décision invite plus que jamais à la vigilance sur les procédures
De nombreuses difficultés avaient été évoquées lors de l’audience du 23 septembre: sur la précédente condamnation de Robert EDA pour exploitation minière hors-titre et l’octroi de nouvelles autorisations depuis, sur le peu d’expérience de Christian BLAKAMAN qui aurait pourtant été recommandé par les services de l’Etat, sur la “dérive administrative”, sur “un dossier mal construit”… L’avocat général avait alors requis la relaxe pour les deux prévenus, sans pour autant remettre en cause la réalité de la destruction de l’environnement, refusant “l’instrumentalisation de la justice” par l’Etat.
Le tribunal en a finalement décidé autrement, retenant la culpabilité de Christian BLAKAMAN et demandant l’indemnisation à hauteur de 5 000 euros du préjudice de chaque partie civile, mais sans reconnaître le préjudice écologique. Le second prévenu, Robert EDA, voit sa procédure judiciaire annulée à cause de l’irrégularité de sa convocation. La décision, non encore publiée lors de la sortie de ce communiqué, est susceptible d’appel sous 10 jours. “Le plus important c’est la condamnation de cette infraction environnementale pour mettre fin à l’impunité, néanmoins ce dossier montre que les procédures administratives et judiciaires restent perfectibles” résume Matthieu Barthas, président de Guyane Nature Environnement.