Ce matin, la commission départementale des mines a voté en majorité contre le renouvellement des concessions de la société Montagne d’or à Saint Laurent du Maroni et Apatou. La question du renouvellement des concessions minières, première étape avant l’instruction de leur projet de méga-mine industrielle, avait déjà été posée à la commission des mines en 2019, laquelle avait donné le 29 avril 2020 un avis favorable. Le revirement de la position de la commission des mines témoigne d’une avancée notable dans la prise en compte de l’environnement dans les projets miniers, qui devra se poursuivre.
Une avancée dans la prise en compte de l’environnement
L’avis défavorable porte sur le renouvellement de deux concessions historiques de la compagnie Montagne d’or, Boeuf-Mort et Elysée, qui étaient arrivées à échéance le 31 décembre 2018. Le renouvellement de ces concessions minières est la première étape avant de pouvoir mettre en place le projet de méga-mine industrielle qui a fait l’objet d’une forte opposition des citoyens, notamment des peuples autochtones, lors du débat public en 2018. Pour mémoire, ce projet visait à créer une mine à ciel ouvert d’au moins 2,5 km de long sur 400m de large et plus d’une centaine de mètres de profondeur et à traiter le minerais au cyanure, en bordure de la Réserve Biologique Intégrale de Lucifer Dékou-Dékou, la plus grande de France. Les concessions se trouvent sur un site exceptionnel en termes de biodiversité, un corridor écologique recensant plus d’une centaine d’espèces remarquables et un tiers des espèces d’oiseaux présentes en Guyane. La déforestation engendrée, l’impact sur les cours d’eau et les risques industriels liés au cyanure, aux autres matières dangereuses, aux tirs de mine, à la rupture de digues et au lessivage des sols ne sont pas acceptables dans un environnement aussi exceptionnel.
Après avoir refusé implicitement le renouvellement des concessions, l’Etat s’était faiblement défendu devant le Tribunal administratif de Cayenne, qui a considéré le refus de renouvellement contraire au code minier. L’Etat avait fait appel de cette décision devant la Cour administrative d’appel de Bordeaux, qui avait conclu dans le même sens. L’Etat a de nouveau contesté cette décision devant le Conseil d’Etat. Le Conseil d’Etat a d’ailleurs demandé au Conseil constitutionnel si le code minier était conforme à la Constitution, dans le cadre d’un recours formé par France Nature Environnement sur les concessions Boulanger.
Dans le même temps, les parlementaires ont acté que l’on pourrait refuser un projet minier si son impact environnemental était trop élevé, dans le cadre de la loi Climat et résilience. Le changement de la position de la commission des mines semble donc emprunter la même direction d’une meilleure prise en compte de l’environnement dans l’instruction des projets miniers.
Maintenant, une position à tenir malgré la pression
Le projet de Montagne d’or n’est pas enterré pour autant. En effet, l’avis défavorable de la commission des mines est un avis simple et le Ministère de l’économie pourrait ne pas en tenir compte et renouveler ces concessions. De plus, la France est actuellement visée par un contentieux arbitral international par les actionnaires russes de Montagne d’or sur le non-renouvellement des concessions, réclamant 4 milliards d’euros d’indemnités à l’Etat. En outre, la société Orea Mining, l’autre actionnaire de Montagne d’or, a annoncé le 1er septembre dernier vouloir revenir avec un projet modifié soit-disant plus vert, à la veille de l’ouverture du Congrès Mondial de la nature, marquant leur volonté de ne pas abandonner.
Renouveler les concessions Montagne d’or serait contraire à l’avis défavorable exprimé par les citoyens lors du débat public, à la Charte de l’environnement à valeur constitutionnelle, ainsi qu’au droit européen, qui protège les cours d’eau en bon état de toute dégradation. Guyane Nature Environnement espère donc que l’Etat ne cédera pas à la pression et sera constant dans son refus du renouvellement des concessions et du projet de Montagne d’or.